Gentilé et nom d'usage

Warnécourt >  Warnécourtois

Dans son ouvrage « Traditions, coutumes, légendes et contes des Ardennes » paru en 1890, Albert Meyrac précise que les habitants de Warnécourt sont surnommés les « Gueulards » et cite un dicton local :

On ne peut passer à Evigny sans être crotté.

A Warnécourt sans être moqué.

A Fagnon sans être volé.

  

Même si  on ne doute pas qu’il reste quelques « gueulards » dans Warnécourt, ce ne reste qu’un surnom. Le nom officiel des habitants n’ayant jamais été trouvé et ne semblant pas existé, nous avons depuis quelques années plus ou moins adopté celui de « Warnécourtois ».  Pour nous affirmer dans cette voie  nous avons interrogé M. Michel TAMINE, maître de conférences et chargé de cours à l’Université de Reims, grand spécialiste du parler ardennais et auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet : « Le parler des Ardennes », «  Corpus microtoponymique du département des Ardennes d’après le cadastre napoléonien » …  Ce dernier nous a fait le plaisir de nous répondre et nous vous communiquons ci-dessous sa réponse détaillée. Merci à lui.

Le nom de la localité provient, comme l'immense majorité des noms de lieux terminés par -court, de l'association d'un nom de personne et de l'élément court, qui désigne au moment de la nomination, une propriété, un domaine agricole.

La structure de ces composés, qui donnent d'abord le nom de personne (propriétaire ou exploitant) puis le nom commun signifiant "domaine", indique des formations remontant à l'époque des grandes invasions, soit une période s'étendant du VIe au Xe siècle. Il n'est donc pas étonnant que le premier élément Warn- soit d'origine germanique : il remonte  à un nom de personne du type Warin-, issu d'un nom signifiant "protection". Associé à l'élément hari "armée", cette base a donné en France le nom de personne très répandu Garnier. Mais dans les Ardennes, comme dans de nombreux parlers du nord-est, le W- initial d'origine germanique s'est maintenu, alors qu'il s'est transformé en gu- en français.

Quant au nom des habitants, il faut distinguer le blason populaire ou encore le sobriquet collectif du gentilé. Le blason populaire, donné la plupart du temps par des communautés voisines,  est souvent  dévalorisant ou négatif, et celui des habitants de Warnécourt (les "Gueulards") n'échappe pas à la règle, tandis que le gentilé est le nom officiel, que l'on retrouve dans la presse, parfois dans les documents administratifs. L'existence d'un gentilé n'est pas obligatoire et beaucoup de communes n'en possèdent pas. Mais la tendance actuelle est à leur multiplication, car ils servent aussi d'adjectifs et de noms communs (ainsi pour Lille, le gentilé lillois sert d'adjectif : "la région lilloise", et de nom commun : "les lillois sont sympathiques").

Le choix de "warnécourtois" pour les habitants de Warnécourt paraît judicieux, d'abord parce qu'il s'intègre dans une série bien établie : en effet, 82 % des communes dont le nom se termine par -ourt  ont créé leur gentilé par adjonction du suffixe -ois, -oise.  Dans le cas de -court, le résultat est heureux, puisque la fin du gentilé est homonyme de l'adjectif  français "courtois". Et dès lors, qui oserait affirmer que les warnécourtois ne sont pas courtois ?